Sarlat nous livre ses secrets
Baladons-nous dans capitale du Périgord noir
Sarlat-la-Caneda est incontestablement l’un des joyaux français les plus connus dans le monde. Mais, savons-nous vraiment tout de cette belle du Périgord noir dont il est si facile de tomber amoureux pour son architecture, son histoire et son élégance ?
Textes & photos – Frédéric Lemont
• Article paru dans notre numéro d’été 2018 •
1 – Une ville qui pèse
Typiques de l’architecture périgourdine, les maisons recouvertes de lauzes sont partout dans Sarlat. Des pierres de 3 à 5 centimètres d’épaisseur sont donc empilées les unes sur les autres et séparées par des joints pour former ces magnifiques toitures de dentelle minérale. Une prouesse technique qui requiert une maçonnerie et une charpente qui tiennent sérieusement la route ! En effet, le mètre carré de lauze pèse entre 500 et 800 kilos.
2 – Fermez les fenêtres !
Et au milieu roulait un tramway… Dans la Traverse (rue de la République), percée dans la ville entre 1836 à 1840, passait donc une ligne de tramway à vapeur inaugurée en 1912 pour compléter le réseau ferroviaire déjà existant. Il reliait Villefranche- du-Périgord à Sarlat.
On dit qu’à son approche, les habitants de la Traverse fermaient vite leurs volets pour se protéger de la fumée. Suite à de nombreux accidents, ce service fut interrompu dans les années 1930.
3 – Pas si potable que ça !
La Fontaine Sainte-Marie, située rue des Consuls, fut longtemps le point de ravitaillement en eau à usage domestique de toute la ville. Implantée au cœur de la cité, elle était si pratique, cette fontaine… mais aussi plutôt dangereuse ! La proximité des écuries et des rues dans lesquelles les habitants déversaient détritus, urines et excréments – sans parler des cochons qui s’y baladaient tout à fait librement ! – a entraîné de graves pollutions de l’eau et donc des épidémies de typhoïde jusqu’au XXe siècle.
4 – Protection mariale
Parmi les 50 niches mariales répertoriées – souvent au niveau du 1er étage des bâtiments et aux angles des rues–, une dizaine sont vides. Les autres sont occupées par des madones.
Cette omniprésence de Sainte-Marie dans l’architecture de Sarlat a débuté après l’épidémie de peste noire de 1348. La ville se plaça alors sous la protection de Marie. De surcroît, ces niches, dans lesquelles étaient aussi placées des chandelles, ont servi d’éclairage public jusqu’au XIVe siècle.
5 – L’église « Nouvel »
C’est l’architecte mondialement connu Jean Nouvel, originaire de la région sarladaise, qui a donné une nouvelle vie à l’église Sainte-Marie en la transformant en un marché couvert complété de deux mezzanines. Pourquoi un marché ? Parce que c’est un lieu de vie, comme a pu l’être l’église à son origine.
Dans le passé, les lieux de culte étaient également les endroits où s’effectuaient la plupart des actes de la vie politique, sociale et culturelle. Construit en 1365, l’édifice fut désaffecté dès 1794 avant d’être occupé par une usine à salpêtre, une boulangerie – il suffit de lever les yeux pour constater qu’une partie de la nef est encore un peu noire à cause de la fumée du four – , puis un commerce de charbon, un bureau de poste et un dispensaire. La modernité de l’architecture de Jean Nouvel contraste avec l’ancienneté. Un très intelligent moyen de suggérer une certaine dimension du temps.
Derrière l’église, l’architecte a installé un ascenseur à ciel ouvert pour contempler les toits de la vieille ville. Une merveille à découvrir !
6 – La terrasse de l’amour
Ce renfoncement visible rue des Consuls, à l’arrière de l’Hôtel Plamon est une “trompe” qui permettait un champ de manœuvre plus grand aux charrettes.
On note qu’elle soutient un élégant balcon orné d’une rambarde en fer forgé de style Louis XIII. Les plus romantiques Sarladais l’affirment : elle aurait été pensée par un père aimant, qui souhaitait que la fenêtre de sa progéniture et celle de son être aimé communiquent par un joli passage discret.
7 – « Parce que c’est lui… »
Étienne de La Boétie est une institution à Sarlat ! Et n’allez surtout pas dire à un Sarladais de souche qu’il s’agissait de l’ami de Montaigne. Même si ce dernier expliquait leur amitié en ces termes si forts, “parce que c’était lui, parce que c’était moi !”, La Boétie était bien plus que ça !
Né à Sarlat le 1er novembre 1530, il était un écrivain humaniste et un poète talentueux, notamment connu pour son Discours de la servitude volontaire, rédigé alors qu’il avait 16 ou 18 ans. Ce court réquisitoire contre l’absolutisme pose la question de la légitimité de toute forme d’autorité sur une population en essayant d’analyser les raisons de cette soumission. Un sujet résolument moderne, non ?
Cette statue, réalisée par Tony Noël a été érigée en 1892 sur la place de la grande Rigaudie.
8 – À ciel ouvert
Au début du XVIe siècle, alors qu’il avait prévu une totale reconstruction de la cathédrale Saint-Sacerdos, l’évêque Armand de Gontaut quitte son évêché. Il s’est réservé la collation des bénéfices et la plus grande partie de la mense épiscopale (biens et revenus d’un évêché). Après un procès, l’argent serait alors en effet bel et bien revenu à Sarlat…
Encore aujourd’hui, on ne sait pas très bien qui en a bénéficié ! Quoi qu’il en soit, les travaux ont été arrêtés pendant un siècle et demi. Qu’y avait-il alors entre le chœur du XVIe siècle et le clocher-porche roman ? Rien ! Pas de toit. Simplement du vide !
9 – Rue des (chauds) lapins
La rue des Trois Conils est un passage étroit situé dans le quartier ouest de la vieille ville. Une rue confidentielle, dont le nom serait lié à l’activité “commerciale” qui s’y serait longtemps déroulée. En occitan, le mot “conhil” signifie “lapin”.
Non, cette rue n’était pas un haut lieu de l’élevage de ces petites bébêtes aux grandes oreilles ! Dans le langage populaire, ce terme désigne aussi le sexe féminin (tout comme la femelle du chat en français). Un mot qui rejoint le terme d’argot français qui reprend les trois premières lettres de “conhil” – vous l’aurez compris, nous tentons ici de rester dans un registre de langue… euh… tous publics !
En tout cas, cette rue était connue pour être celle des maisons closes.
10 – La Loi Malraux
Le 4 août 1962, la loi Malraux sur la conservation du patrimoine entre en vigueur en France. Alors que les centres urbains commençaient à être profondément modifiés par l’urbanisme moderniste, la loi d’André Malraux, ministre chargé des Affaires culturelles sous De Gaulle, prévoit la création de secteurs sauvegardés pour amorcer la préservation et la mise en valeur du patrimoine de France.
Des règles d’urbanisme et d’aménagement sont établies. La première commune à bénéficier d’un secteur sauvegardé n’est autre que Sarlat elle-même. Hasard ? Peut-être pas ! Malraux était très attaché au Périgord. Et pour cause: en 1944, engagé sur le tard dans la résistance, il eut en charge de coordonner le maquis de Dordogne avec ceux du Lot et de la Corrèze.
11 – La mystérieuse lanterne
Cet édifice dressé vers 1180 est encore aujourd’hui appelé la Lanterne des morts. Or, c’est formel : la Lanterne des morts, censée guider les âmes vers le ciel, n’en est pas une. Certains affirment que la pièce du premier niveau était une chapelle servant de dépositoire des morts.
Au XIXe, on avait totalement perdu le sens de cet édifice. À tel point que pour le faire classer au titre des monuments historiques, il fut décrit comme étant un bâtiment célébrant le passage de Saint-Bernard. Mais, en considérant la liturgie du XIIe siècle, cette “lanterne” pourrait être une interprétation du dôme du Saint-Sépulcre de Jérusalem tel qu’il était représenté depuis le IVe siècle : une tour circulaire, avec une porte au premier niveau donnant accès au Tombeau du Christ, et un second niveau coiffé d’un baldaquin à douze colonnes. Il se dit beaucoup de choses sur ce bâtiment aussi surnommé “le suppositoire de Gargantua”.
Certains y auraient fait des expériences pour prouver qu’il s’agirait d’un nœud de champs énergétiques liés à des réseaux telluriques. Il se dit aussi que Jean Nouvel s’en serait inspiré pour dessiner la tour Glòries de Barcelone.
12 – Chapeau pointu
Regardez bien le toit de la tour de noblesse du Manoir de Gisson. Il semble être “mal vissé”, non ? Normal : les 6 murs de l’édifice soutiennent un toit heptagonal (à 7 côtés). On dit que cette toiture aurait été conçue pour un autre bâtiment. Mais il est beaucoup plus probable qu’il s’agisse simplement d’une sorte “d’excentricité architecturale” pour se démarquer…
Retrouvez d’autres secrets de Sarlat et l’intégralité de cet article en lisant le numéro 2 du magazine L’Édition Périgord que vous pouvez commander et recevoir dans votre boîte aux lettres en cliquant ici.
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